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Cession d’un domaine viticole : accent sur quelques éléments particuliers remarquables

13 mai 2023

par Frédéric Schuller, Notaire, ÉTUDE BENEDETTI, WI&NE Occitanie.

La cession d’un domaine viticole est un évènement pour le moins important et sensible que ce soit pour le cédant, futur retraité ou entrepreneur en quête d’un nouveau défi, pour le cessionnaire-investisseur, et bien entendu pour tous les professionnels associés à l’opération.

Parmi eux, le notaire occupe une place de choix. Souvent considéré comme la dernière étape d’un long parcours, celle de la signature, il détient en réalité une position stratégique à la croisée de bien des chemins et des disciplines. De ce fait, son concours gagne à être sollicité bien en amont du projet.

Il serait impossible et soporifique d’aborder ici tous les points névralgiques d’une cession. Parmi ceux-ci, nous pourrions citer pêle-mêle la (ou les) structure(s) sociale(s) à constituer pour la reprise, la conformité des bâtiments aux règles d’urbanisme, la vérification des titres de propriété du vendeur ou des baux, les plus-values… Mais je vous propose une mise au point sur certains éléments plus discrets, hors des sentiers battus, mais tout aussi remarquables.

Commençons par le commencement : qu’est-ce qu’un domaine viticole ?

Territoire de production du vin, constitué de vignes et d’infrastructures permettant d’élaborer et de transformer le raisin en vin.

Un domaine est donc au sens juridique une universalité ! Soit une somme d’éléments divers qu’ils soient immobiliers (terres, château, caves…) ou mobiliers (matériel, stocks), qu’ils soient corporels (tracteurs et machines) ou incorporels (marques, contrats de travail, clientèle, baux) …

Vous l’aurez compris, la première difficulté lors de la cession sera le recensent précis de ce qui va être cédé, et de ce qui ne le sera éventuellement pas, afin de laisser au repreneur toutes les clefs d’une entreprise parfaitement en ordre de marche.

Toute omission peut avoir des conséquences désastreuses !

Affaire sensible : la pollution des vins par les polychlorophénols (PCP)

Il nous faut mettre le nez dans la cave lors de la cession, pour tenter de voir ce qui est invisible, ou plutôt de le sentir…

Vous en conviendrez, le vin est une boisson délicate, sensible aux altérations. Les progrès de l’œnologie ont permis d’éliminer un grand nombre de défauts liés aux conditions de vinification et de stockage. Parmi eux, le goût ou l’odeur de « moisi » dont la source n’est pas toujours le bouchon. Ce qui peut apparaître avant le conditionnement des vins, même dans des cuves entretenues.

Le coupable ? Le chloroanisole (CA), le tétrachloroanisole (TeCA), le trichloroanisole (TCA), ces trois composés provenant de la dégradation des chlorophénols. Ces produits entrent dans la composition d’insecticides destinés au traitement des … bois !

L’ennemi vient donc des charpentes de caves, lambris, agglomérés isolants, caisses-palettes… pour finir dans le vin et le corrompre.

Pour éviter toute déconvenue après la vente, un diagnostic atmosphérique préalable à la cession est à conseiller avec le cas échéant un audit, non seulement dans l’intérêt évident du repreneur, mais également dans celui du vendeur qui pourrait voir sa garantie recherchée après la cession au titre des vices cachés.

Éviter les pièges (coûteux) de la TVA

À l’occasion de la cession du domaine, deux points sensibles touchant à la TVA ne manqueront pas d’intéresser les parties :

  1. D’une part la cession d’un certain nombre d’éléments du fonds (notamment le stock de vin) est-elle assujettie à la TVA ?
  1. D’autre part, la cession des immobilisations en cours d’amortissement ayant ouvert droit à déduction de TVA (en particulier les constructions ou travaux réalisés sur le bâti et les aménagements de la cave) entraîne-t-elle la régularisation de la TVA déduite si celle-ci intervient avant la vingtième année ?

La réponse à ces questions est par principe positive entraînant des contraintes de financement et de trésorerie importantes pour l’acquéreur, mais aussi un risque de redressement pour le vendeur.

Cependant, l’article 257 bis du Code général des impôts (CGI) prévoit une exception, lorsque la cession peut s’analyser en une transmission d’une universalité de biens entre deux redevables de la TVA. Dans ce cas, l’opération de cession ne soumet pas l’opération à la TVA et ne remet pas ni la remise en cause des droits à déduction du vendeur.

Attention, cependant, à respecter les critères précis posés par la réglementation et de prendre à l’acte les déclarations chiffrées qui s’imposent.

Nom de château : attention au mirage

Lors de la vente d’un domaine, le vendeur ne saurait se réserver le droit d’utiliser le nom du domaine comme marque. Une clause en ce sens serait nulle de nullité absolue. En effet, les marques viticoles, contrairement aux marques commerciales, ne peuvent être cédées séparément de l’exploitation dans la mesure où elles ne sont pas dissociables du lieu de production.

La jurisprudence considère depuis bien longtemps que le nom de château est une marque inséparable du fonds qui produit le vin.

Plus précisément, la marque attachée à un domaine viticole est un élément d’actif immobilisé autonome. Peut-on alors l’amortir comptablement, me demanderez-vous ? Et bien non, car sa durée prévisible d’utilisation ne peut être fixée dans le temps.

Montrer patte blanche : le contrôle des structures

Le contrôle des structures est une réglementation qui encadre la mise en valeur, quelle que soit la nature du contrat et des immeubles agricoles à des fins professionnelles (installations, agrandissements, réunions d’exploitation) sont ainsi soumis à autorisation.

Le contrôle est élaboré autour de critères de superficie, mais aussi de critères personnels tels que l’expérience professionnelle ou les diplômes.

En second lieu, il convient d’établir la volonté du propriétaire d’imprimer une destination aux biens, c’est-à-dire un lien fonctionnel avec le fonds. L’affectation doit être durable, réelle et surtout nécessaire à la mise en valeur de l’immeuble.

L’autorisation au titre du contrôle des structures étant longue, mieux vaut ne pas se lancer sur le projet sans certitude sur la question !

Sans visibilité, point de renommée !

Tous les domaines viticoles ne peuvent s’enorgueillir d’être connus et reconnus au-delà des frontières par la simple évocation de leur nom, hélas. Au contraire la plupart, outre la qualité de leur produit, doivent compter sur la bonne image qu’ils ont acquise grâce aux à leur communication : site internet (avec ou sans vente en ligne), réseaux sociaux, page Google ou sites de référencement pour ceux proposant le gîte (et/ou le couvert) in situ !

Ces précieux avis, étoiles, commentaires, référencements ne doivent surtout pas être perdus dans la cession sous peine de tout devoir recommencer, ce qui engendrera un coût non négligeable et surtout du temps, qui sera mieux consacré par le repreneur aux vignes, à la cave ou à choyer ses marchés.

Les éléments de communication font en tout partie de la cession, et gare à ne pas passer à côté.

Vous l’aurez compris, en matière de cession d’un domaine viticole, mieux vaut s’entourer des bons partenaires !


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